Haro sur la corrida ! Les
Mythes Tauromachiques, ouvrage publié en cette rentrée 2009, s'applique à
décrypter puis à démythifier la tauromachie.
Son auteur Marc Fabre y interpelle nommément les écrivains, philosophes,
artistes, psychiatres, psychanalistes, journalistes, écclésiastes, toreros,
gens du mundillo, politiques qui se font ou se sont fait les chantres de la
corrida.
Avec clarté, discernement, savoir, talent et humour Marc Fabre dissèque la
corrida, les actes tauromachiques et ses justifications.
Ainsi, au détour des 256 pages, j'y découvre que les taureaux combattus à 2,
3 ou 4 ans ne sont que des veaux ! que le dénommé "taureau de combat" est
naturellement un animal paisible, qu'à force de sélection et consanguinité les
taureaux de livrée normalement bais, blancs, marrons ne sont plus que noirs
pour coller à un imaginaire de bête monstrueuse, que l'origine de la corrida
provient de jeux cruels de bouchers de Séville et non d'antiques jeux du
cirque, que la corrida est tout le contraire de licencieuse en s'acoquinant
avec les pires fachos, franquistes ou opus-déistes, que l'église catholique
s'accomode fort bien des Olé*, que la corrida est en France largement subventionnée par les deniers publics...
Marc Fabre démontre que la corrida n'a rien à voir avec la tragédie grecque, qu'elle n'est, contrairement à l'affirmation de tel ou tel penseur, ni naturelle ni humaniste, qu'un petit examen psychanalytique fait frémir sur la nature des pulsions des spectateurs de l'arène, qu'il y a souvent imposture à faire coller à l'aficion nombre de philosophes, écrivains ou artistes célèbres... Et il y en a beaucoup d'autres comme ça, pied à pied sur le terrain de l'intelligence et de la philosophie, une vraie entreprise de démolition des mythes de la tauromachie.
Ce livre interpelle vraiment. Moi qui allais à une époque assister à des
corridas, bluffé par le tipico et les espagnolades, ébloui par les habits de
lumière, les véroniques de cape, les paso doble, éclairé par cette
lecture, j'aurais beaucoup de scrupules à retourner à ce "spectacle"...[moins sensible que d'autres à la douleur animale, je vivais les corridas avec quand même un certain malaise : celui d'être spectateur éventuellement responsable de blessures ou de la mort d'un torero - et le regard détourné de la foule sur les trifouillages de la puntilla exécutés en douce dans le cerveau des taureaux]
* à ce propos, tous les éthymologistes l'affirment, les Olé! proviennent tout
droit des Y'allah! des arabes présents en Andalousie jusqu'au 16ème siècle.
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Banderilles factices lors de la 1ère corrida bloodless. Photo: © Erik Kabik/ RETNA/www.erikkabik.com
Signe des temps, des corridas "bloodless", sans pique et banderillas scotchées au velcros (cela fait hurler à la mort les partisans de la mise à mort) sont organisées pour la première fois à Las Vegas. Ici le compte-rendu et les photos de la première, le 14 septembre 2009, dans le Vegas News ! => www.vegasnews.com
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