"rastaquouères"
Massilia reggae vibrations
Marseille est une terre de musique, où le « Peace and Love » relayant les messages rebelles des rastas reste dans l'air du temps.
Hors de son pays d'origine—la Jamaïque—, le reggae a voyagé à travers le monde entier. A Marseille, il rayonne de la plus belle des manières. En effet, la cité phocéenne n'est pas loin d'être la troisième capitale mondiale du reggae après Kingston et Londres. Elle n'en finit pas de rendre hommage à la musique populaire jamaïcaine. Avec ses concerts, spectacles, radios et artistes, Marseille est devenue l'épicentre d'un « Peace and Love » à la sauce aïoli.
La salle du Moulin continue d'accueillir les plus grandes têtes d'affiche du reggae planétaire—Israël Vibrations, Burning Spear, U-Roy, Tiken Jah Fakoly…Les vrais amateurs, un peu plus attirés par l' underground « roots and culture », vont certainement préférer la tranquillité du Cours Julien pour affirmer leur rasta attitude. Là, non loin de l'Espace Julien (salle mythique), on peut trouver cafés et bars « rootsie », avec une mention spéciale à la Planète Caraïbe (50, Cours Julien) où l'on déguste les saveurs de la cuisine afro-caribéenne sous des rythmes reggae et dancehall. Que dire alors des fusions éclectiques sur la scène du Balthazar qui offre à ceux qui fréquentent les hauteurs de la Plaine, un mix empreint de dub et de beat électronique aux influences résolument « roots rock reggae »
Mélange, tel est le mot qui définit toute la vision marseillaise du reggae, relayée d'abord par les radios locales. En effet, la station Galère (88.4) propose à ses aficionados—à travers l'émission intitulée Imanity—un voyage au coeur de la Jamaïque old school des années 1970 et 1980. Radio Grenouille n'est pas en reste. Le mardi sur les coups de 22 heures, c'est Power Station (reggae, regga, dub), suivi de La Bijouterie Jamaïcaine, sans oublier la chronique Overstand (présentée par moi-même) consacrée à la culture de résistance dans la musique populaire jamaïcaine.
Mais si le reggae se porte bien dans la cité phocéenne, c'est grâce notamment aux artistes qui se sont récemment regroupés autour du collectif Marseille Reggae All Stars. Ils sont musiciens, DJs, toasters, ou tout simplement rastas, passionnés de vibrations jamaïcaines. En témoigne l'album éponyme qu'ils ont sorti en 2002, et les nombreux concerts qui ont eu lieu aux Docks des Suds. Cité par le magazine L'Express, Stéphane du studio Magnetic Mab initiateur de ce concept fédérateur, déclare : « Le reggae est à l'origine une musique de métissage. Or, à Marseille, les gens se sont toujours mélangés. Le reggae ne pouvait que s'y sentir bien. » Et Elvas des Sons of Gaïa d'ajouter : « C'est la seule ville où les condés serrent la main aux mafieux et où le reggaeman fait la bise au hard rocker. »*
Si la scène régionale est assez forte avec des groupes comme Raspigaous ou Massilia Sound System, elle souffre cruellement d'un manque de structures professionnelles indépendantes, capables de produire et de rentabiliser tout le potentiel musical du reggae marseillais. Hormis le Marseille Reggae All Stars qui compte une trentaine de groupes, les projets pouvant créer une véritable industrie musicale autonome sont presque inexistants. De même que les festivals uniquement dédiés au reggae se font rares. Toutefois, pour sa diffusion, cette musique bénéficie d'un réseau quasiment unique de radios, bistrots et cafés-concerts qui animent régulièrement des soirées festives. De quoi envisager un avenir radieux…
* « Le reggae à la sauce française – Jah, love et aïoli ». L'Express du 14/11/2002.
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